Vers l'aperçu

Vers un marché immobilier résidentiel à deux vitesses?

La différence entre une habitation moyenne de label A et de label D s'élève aujourd'hui à environ 54.000 euros. Cette tendance va-t-elle se poursuivre dans les années à venir?

Pour l'heure, les prix de l'immobilier résidentiel augmentent moins vite que l'inflation générale. Selon le dernier Baromètre de l'immobilier, un logement coûtait en moyenne 7,6% plus cher, au cours des neuf premiers mois de 2022, qu'en 2021.

Pourtant, la hausse des taux met de plus en plus en péril l'accessibilité au logement. Dans son dernier rapport annuel (2021), la Banque Nationale de Belgique (BNB) calculait que les ménages consacraient en moyenne 26% de leurs revenus au remboursement d'un prêt hypothécaire. Selon nos calculs, ce pourcentage a grimpé à près de 30% depuis le début de l'année en raison de la hausse de 2 points de pourcentage du taux d'intérêt moyen effectivement payé. Les taux à long terme ayant par ailleurs augmenté de 3 points de pourcentage sur la même période, une nouvelle hausse des taux hypothécaires au cours des prochains mois est probable.

Incertitudes exceptionnelles

L'indice d'accessibilité a ainsi atteint son niveau le plus élevé depuis le début des années 90. Contrairement aux années 90, l'inflation et surtout la forte augmentation de la facture d'énergie érodent aujourd'hui le pouvoir d'achat du revenu librement disponible après le remboursement hypothécaire. Dans l'intervalle, l'International Energy Agency (IEA) a d'ores est déjà en garde contre le fait que l'hiver 2023/2024 sera plus difficile pour l'Europe que celui-ci, car, en 2023, nous devrons probablement remplir les réserves de gaz vides sans gaz russe.

Dans ce contexte, les candidats acquéreurs doivent tenir compte d' incertitudes exceptionnelles , ce qui peut mettre les prix de l'immobilier sous pression. Pour 2023, nous tablons donc à présent sur une légère baisse nominale.

Les candidats acquéreurs voient toutefois leur revenu brut augmenter fortement en raison des indexations successives. En outre, l'encours d'une dette fond en partie si l'inflation est élevée pendant quelques années. Par ailleurs, les frais de construction et de rénovation ont augmenté d'environ 25% cette année. Cette hausse soutient la valorisation de marché des habitations économes en énergie récentes, mais peut ralentir la dynamique de rénovation.

Vers un PEB A

Suite au Green Deal, l'ensemble du parc immobilier devra évoluer vers un label PEB A d'ici 2050, soit une consommation inférieure à 100 kilowattheures par mètre carré. En Flandre, une obligation de rénovation s'appliquera à partir du 1ᵉʳ janvier 2023 pour que toute maison atteigne le label D dans les cinq années suivant l'achat. Les ambitions de rénovation seront encore renforcées avec une obligation de label C en 2028, de label B en 2035 et de label A en 2040. En matière de prix de l'immobilier, cela mènera-t-il à un marché immobilier résidentiel à deux vitesses?

Une étude de Reusens, Vastmans et Damen montre qu'il y a déjà aujourd'hui une différence de prix considérable entre les habitations résidentielles avec une consommation d'énergie par m² élevée et celles à faible consommation. Une maison flamande avec un score EPC de 150 kWh/m² (label énergétique B) est ainsi environ 12% plus cher qu'une maison similaire avec un score EPC de 350 kWh/m² (label énergétique D) et 22% plus chère qu'une maison avec un score EPC de 650 kWh/m² (label énergétique F). L'étude corrige les différences dues à la vétusté, à la localisation, etc. Ces dernières années, cette différence de prix a augmenté au profit des scores EPC plus élevés.

La différence entre une habitation moyenne de label A et de label D s'élève aujourd'hui à environ 54.000 euros. Cette tendance va-t-elle se poursuivre dans les années à venir? Cette différence de prix s'explique principalement par le fait que les propriétaires d'une habitation ayant un meilleur label EPC ont une facture d'énergie moins élevée. En théorie, une habitation labellisée A consomme 85% d'énergie en moins qu'un label D.

Pour un coût moyen de chauffage de 3.450 euros par an pour la maison portant le label D [1] , cela donne lieu à une économie escomptée (sur la base d'un taux hypothécaire de 3,2%) de 44.000 euros sur les 20 prochaines années. Ce qui est proche du surcoût que vous payez aujourd'hui pour une habitation labellisée A par rapport à une habitation ayant un label D qui coûte 290.000 euros. La surconsommation pour les habitations labellisées E et F par rapport au benchmark D s'élève à 15.000 et 37.000, soit un peu plus que le surcoût escompté de 12.000 et 30.000. 

Nous savons toutefois que les habitants de logements énergivores sont contraints d'utiliser l'énergie avec parcimonie, de sorte que leur consommation d'énergie réelle est nettement inférieure à la consommation d'énergie attendue ou modélisée.

Nous pouvons également comparer la différence de prix actuelle au coût de rénovation nécessaire pour revaloriser le bâtiment. Le coût d'une telle rénovation diffère d'une étude à l'autre, mais est estimé à entre 45.000 et 80.000 euros pour passer à un label A . Cela correspond à nouveau à la différence de prix actuelle de 80.000 euros entre une habitation labellisée F et une habitation A. Autrement dit, la différence d'efficacité énergétique est déjà en grande partie prise en compte sur le marché.

[1] Sur la base d'un ménage moyen de quatre personnes, coût moyen du chauffage 10/2021-10/2022 (chiffres Creg).