Augmenter la valeur ajoutée durable et sociale

Énergie et transition

La première Sherpasession du Brain Trust sur l'axe "développement durable" a eu lieu le 25 octobre. Une fois encore, nous remercions tout particulièrement les experts participants pour cette discussion stimulante sur les obstacles et les leviers de la transition énergétique.

La question centrale était de savoir comment rendre le paysage énergétique de notre pays plus robuste à moyen terme face aux chocs de l'offre (et de la demande) que cette transition énergétique entraînera inévitablement, indépendamment des développements géopolitiques ultérieurs.

Comment coordonner cette transition énergétique ? Et qui prendra l'initiative de le faire ? Le gouvernement, les entreprises, d'autres organisations ? En fixant un bouquet énergétique ou un objectif climatique ? En envoyant les bonnes incitations ? Et s'agira-t-il de signaux de prix, de subventions ou d'interventions fiscales, ou d'une politique industrielle pleinement développée ? Quelles sont les conditions cadres à respecter : sécurité de l'approvisionnement ou accessibilité financière, inclusion ou normes d'émission ?

Comment protéger les consommateurs d'énergie "ordinaires" en particulier des chocs trop importants dans le processus ? Et d'autre part, la transition va-t-elle assez vite ?

La première session des Brain Trusts avec un groupe de voix diverses mais authentiques travaillant avec des experts sur cet axe a eu lieu le 15 novembre. La conversation a porté sur le sens et l'absurdité des subventions aux combustibles fossiles et à la R&D, sur l'aspect psychologique de la transition et sur les choses à faire et à ne pas faire pour obtenir le soutien du public et des entreprises, ainsi que sur l'absence d'une perspective systémique chez les décideurs politiques.

Innovation

Le deuxième thème de cet axe, après le "matériel" et les infrastructures du premier thème, s'est concentré sur le "logiciel" du développement durable : dans quelle mesure le capital humain de notre pays est capable de générer et de valoriser de nouvelles idées. Le 10 janvier, un groupe d'experts en innovation s'est réuni pour échanger des points de vue à ce sujet. Ils ont été interpellés par l'un d'eux en demandant si et comment les chercheurs et les innovateurs devraient (déjà) tenir compte des effets potentiellement négatifs de l'innovation sur la société au sens large - des effets qui ne se manifestent souvent que des décennies plus tard. (Qui veut un exemple, pensez à PFAS ou à Google...)

Les experts ont ensuite approfondi les différentes étapes du processus d'innovation, à la recherche des obstacles qui empêchent notre pays de réaliser son potentiel. Une fois de plus, il s'est avéré que le rôle du gouvernement n'est souvent pas défini avec suffisamment de précision, que l'innovation n'est pas seulement une question de technologie mais qu'elle comporte également une composante sociale, et que le "système" est généralement bon pour se maintenir tandis que la multidisciplinarité ou l'interdisciplinarité est difficile à intégrer dans ce carcan. Un certain nombre de points communs entre les recommandations du projet Brain Trust apparaissent déjà...

Le 24 janvier, donc, le groupe Brain Trust de l'axe du développement durable s'est réuni ; en grand nombre, d'ailleurs, ce dont nous le remercions sincèrement. L'objectif était ambitieux : les incitations à l'innovation, qu'il s'agisse d'innovation de produit ou de procédé, d'innovation technologique ou sociale, que ce soit dans les start-ups, les spin-offs ou les entreprises en place, sont-elles les mêmes ? Existe-t-il un diagnostic commun ou faut-il distinguer des "personae" qui rendent justice aux différences dans ce large éventail d'innovations ?

La session a servi, comme toujours, à recueillir des idées et des pistes de réflexion que nous aurons ensuite développées et, si possible, quantifiées lors de conversations ultérieures. Sans anticiper cette analyse, il est clair que les écosystèmes sont cruciaux pour une "bonne" innovation : une excellente fertilisation croisée entre la propriété intellectuelle, le capital-risque et le "logiciel" de l'innovation (réseau, coaching, reviews, entrepreneuriat, organisation...).

Quelle durabilité ?

Avec une vision précise du matériel et du logiciel du développement durable, nous prenons le taureau par les cornes dans la troisième phase : quelle est la durabilité que nous visons réellement ? Et comment mesurer les progrès et les succès ? En équivalents CO2, en ppm, en chiffres de PIB, en limites planétaires, en objectifs de développement durable ?

Lors de la session des sherpas, l'orateur principal a souligné l'importance des trade-offs, des compromis entre les différentes dimensions de la durabilité. Même dans un domaine comme l'agriculture, il est extrêmement difficile, voire impossible, de trouver un indicateur synthétique qui mesurerait (les progrès vers) "la" durabilité. Les participants ont eu une discussion tout aussi passionnante sur le "budget carbone" qui nous reste pour maintenir l'augmentation de la température mondiale en deçà d'un certain niveau. Cet aspect ne devrait pas non plus manquer dans le tableau de bord du Brain Trust, notamment en raison des nombreux effets secondaires positifs de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Mais même dans ce cas, des compromis sont possibles, en particulier lorsque nous incluons également les dimensions sociales de la durabilité. Les indicateurs de notre tableau de bord ne sont pas distincts, ils sont reliés en coulisses de manière complexe.

La session du Brain Trust s'est poursuivie dans la même veine, inspirée par les questions soulevées par l'orateur principal Thomas Van Craen de Triodos. Comment la démocratie gère-t-elle les compromis identifiés par les scientifiques ? Et dans quelle mesure la discussion entre experts, spécialistes par expérience et citoyens engagés reste-t-elle une bulle dont la majorité de la population ne se préoccupe pas du tout ?

Une politique systémique

Les dernières sessions de cette première phase d'idées du projet Brain Trust ont porté sur la question des politiques qui aideraient le système belge à traverser toutes ces transitions - énergie, climat, numérique... "Politique" ne se limite pas à "la politique": un message important lors des deux douzaines de sessions organisées dans les trois axes du Brain Trust est que le système, après tout, est bien plus profond que la poignée de résidents de la Rue de la Loi sur les écrans de télévision. L'ensemble de la société civile organisée est plus souvent une extension de l'État plutôt qu'une "contrepartie" notamment.

Nous avons donc cherché à nous inspirer d'autres écosystèmes, le groupe Cronos comme écosystème purement privé dans le monde des TIC, et des homologues public-privé comme CAPTURE (Centre for Advanced Process Technology for Urban Resource Recovery) dans le domaine de l'économie circulaire ou Smart Delta Resources en Flandre et aux Pays-Bas, qui vise à sécuriser les ressources pour les acteurs industriels de la région du delta de l'Escaut. Comment coordonnent-ils un réseau d'acteurs souvent très diversifié ? Sur quelle base les ressources sont-elles allouées ? Comment évaluer les "succès" ou le "progrès" ?

Après tout, les transitions que nous vivons sont ce que l'on appelle des wicked problems, problèmes mal-posés, où même la description du problème n'est pas évidente. Et paradoxalement, si nous pouvions décrire le problème sans ambiguïté, un moyen de le résoudre est souvent à portée de main.

Les discussions ont alors porté sur la cohérence des politiques - prenons l'interaction entre le Green Deal européen, la loi sur la restauration de la nature et les débats sur l'azote. Qui puisse décider sur les politiques et qui peut s'y opposer : les États membres, les citoyens individuels? Souvent ons se heurte à l'irréversibilité (apparente?) de la législation : peut-on jamais revenir sur la décision déclarer, par exemple, une certaine partie de la Flandre parc naturel ?

 
La première phase s'achève ainsi : collecter le plus grand nombre possible d'obstacles et de détours définis avec précision sur la feuille de route pour une meilleure Belgique est derrière nous. Nous tenons à remercier les deux cents spécialistes et experts qui ont accepté de partager leur temps et leurs idées avec nous. Nous les intégrerons dans les semaines à venir dans deux scénarios : le scénario des "sables mouvants" qui met en évidence les défis ainsi que le coût de l'inaction, et la feuille de route avec laquelle le Brain Trust veut assister la Belgique à aller de l'avant.

Après l'été, nous réunirons les participants au Brain Trust pour prioritiser les plus de cent leviers que nous avons déjà identifiés entre-temps. La troisième étape consistera alors à réunir les personnes qui devront le faire - les politiciens et leurs conseillers, les institutions d'audit de notre pays, les principaux acteurs de la société civile - et ceux pour qui nous le faisons: les jeunes dans toute leur diversité. A suivre ici !